Quand on tient un filon qui marche du tonnerre de dieu, alors on le garde bien précieusement et on continue de le faire vivre par tous les moyens possibles. Dead Space ne marchait pas exceptionnellement bien dans les débuts, quoique pour un titre nouveau il réalisait des chiffres tout à fait convenables, mais force est de constater qu'au fil du temps la licence a pris du galon et s'est vue dotée de meilleures ventes, profitant au développement d'une action plus haletante. Un second opus exceptionnel, un épisode Nintendo Wii bouleversant, un titre exclusif au téléchargement sur console malheureusement ingrat, et enfin une application portable des plus glauques et sympathiques... Dead Space est devenue une série dont chaque nouvel opus est attendu de pied ferme par une communauté sans cesse grandissante. Troisième numéro en date, troisième apparition du désormais mythique Isaac Clarke, et un scénario préliminaire aux airs d'achèvement ultime... Bienvenu dans la nouvelle vision du jeu horrifique par EA qui n'aura pas lésiné sur l'action, comme prévu.
Un petit tour par Tau Volantis.

À chaque épisode son nouvel environnement propre. Dans le premier c'était l'
USG Ishimura, dans le second on parcourait la station brinquebalante La Méduse, et désormais c'est sur la planète
Tau Volantis qu'il faudra survivre, du moins dès quatre bonnes heures de jeu (avant ce sera dans l'espace, comme jadis). Un changement qui aurait pu passer inaperçu sur le papier s'il n'avait pas été accompagné par l'ouverture que cela offre au jeu : les murs disparaissent parfois, on évolue désormais sur une véritable planète et il arrivera que notre bon Isaac soit tout bonnement exposé au soleil en extérieur. De surcroît l'ensemble des environnements est bien plus éclairé que jamais. Voilà qui a de quoi surprendre pour une licence dont le but premier était d'effrayer le gamer averti ! D'autant que pour le coup la planète choisie est loin d'être sombre, puisque totalement enneigée, le soleil s'y réverbère puissamment. D'emblée on percevra la volonté d'
Electronic Arts de faire évoluer l'horreur vers quelque chose de plus cinématographique, au profit d'une action haletante pour le moins bouleversante. Certes, le second épisode de la série avait lui aussi son lot de changements et son rythme était plus dynamique que précédemment. Mais ici ce n'est plus qu'une question de rythme, il faut bien comprendre ceci : la peur a disparu, et
Dead Space a muté en un jeu d'action pur et dur, incluant parfois quelques tentatives visant à faire sursauter le joueur, malheureusement en vain. La mort du jeu ? Pas si sûr, mais une évolution qui ne plaira pas à tout le monde, et qui a trop tendance à privilégier une mise en scène pêchue au détriment de bon nombre de qualités disparues ou escomptées mais évaporées.

Isaac Clarke a laissé pousser sa barbe, son mental s'est enrichi et renforcé, quoique le bougre ait décidé de fuir tout ce qui lui rappellerait le Monolithe et son culte dérangeant. Il s'est retranché dans son appartement comme pour y mourir tranquille et, en cela, son image de dur à cuir surprenant et presque charismatique s'en est allée... On a presque l'impression, dans les débuts, qu'on a troqué cet aventurier de l'extrême contre un vieux gars alcoolique du dimanche, mais c'est avant que la chasse ne reprenne réellement. Il ne retrouve peut-être pas sa vigueur d'antan, mais Isaac finit par ressembler beaucoup à ce qu'il était, en énormément moins dérangé toutefois. Et c'est un peu le même reproche que l'on pourra asséner à l'histoire de ce troisième opus qui, d'emblée, sonne comme une fin magistrale, quoique n'en étant peut-être pas une... Tout a changé, de la narration aux caractères, en passant par l'immanquable rythme soutenu imposé. Où est passé
Dead Space ? Pourquoi tout dans ce troisième opus laisse un amer goût
Capcomesque de
Resident Evil 5, avec son scénario pâteux aux rebondissements bateaux et prévisibles ? Deux questions qui en amènent une troisième bien plus difficile à entendre : pourquoi ne nous sommes nous pas préparés psychologiquement à ce choc d'action lorsque
Electronic Arts a annoncé qu'il désirait que sa licence suive le même chemin que celle de
Capcom ? L'avenir de l'humanité, la survie des protagonistes dernier espoir de notre race, et la folie obsolète d'Isaac... Vous n'aviez rien de plus niais à nous proposer, rien de moins bateau et de plus prévisible ? Bref, un constat virulent qui ne contraste que trop avec les caractéristiques passées d'un
Dead Space regretté.
Adieu Survival et bonjour TPS
Dead Space 2 pouvait encore être considéré, à bien des égards, comme un Survival Horror, bien qu'il soit plus orienté action que son prédécesseur. Ne serait-ce que par son ambiance glauque et réfléchie, qui obligeait le joueur à surveiller ses pas prudemment et à conserver précieusement ses rares munitions et objets de soin pour ne pas tomber à court. Mais tout cela est fini désormais,
Dead Space 3 a jeté aux ordures la plus infime partie de Survival, devenant définitivement ce que l'on appelle aujourd'hui un TPS, un jeu de tir en vue de dos... Triste sort, quoique l'on pouvait s'y attendre en écoutant parler les dirigeants d'
EA, qui n'avaient pas caché leur volonté de faire de la licence quelque chose de plus grand publique... Par conséquent, qui dit nouvelle orientation dit changements éloquents, et pour le coup ils sont nombreux. À commencer par un sentiment de linéarité marqué, malgré quelques phases plus libres que jamais, ainsi qu'une action plus soutenue. Les ennemis n'ont jamais été aussi nombreux, et presque derrière chaque porte il faudra s'attendre à en trouver des dizaines. C'est assez frustrant, alors qu'avant la licence jouait beaucoup sur l'ambiance, de découvrir que désormais tout est basé sur des mécanismes et une progression sans once d'originalité ni de terreur. Car malgré les tentatives des développeurs de faire sursauter le joueur dans son canapé, rien ne fonctionne plus. Et c'est bien dommage, car la frousse est remplacée par des cinématiques pêchues et des effets de styles aux tenants dénaturant littéralement
Dead Space, s'éloignant bien trop de ce qu'était la série. Mais attention toutefois, l'ensemble est réussi dans son genre, et procure un gain d'adrénaline souvent revigoré. Il ne faut donc peut-être pas voir cela comme une menace au jeu d'
EA, seulement son changement logique qui mitigera les avis.

Malheureusement, ce changement amène un sentiment navré lorsque l'on constate sans once de plaisir que le gameplay n'a que trop peu évolué, lui, et qu'il se révèle désormais bien trop archaïque pour supporter toutes les péripéties qui attendent Isaac Clarke dans ses aventures dynamiques. À la fois ses déplacements et ses actions sont datées, on aimerait pouvoir se retourner rapidement et déplacer un personnage moins lourd par exemple. Ou encore, puisque le but est de faire de l'action, il aurait fallu suivre la route empruntée par
Resident Evil 6 à fond : des coups de poings et de pieds enchaînés divers et variés, permettant de varier les plaisirs. Parce qu'en plus on aurait plutôt tendance à trouver l'ensemble assez répétitif ! Autant dire que les premières impressions délivrées en janvier, lors de l'ajout de la démo sur les réseaux de téléchargement, étaient plutôt fondées, bien qu'il faut le reconnaître :
Dead Space 3 a plus d'un tour dans son sac. Son système de création d'armes par exemple, sera bien plus agréable et grisant à utiliser que ce qu'il pouvait laisser imaginer de prime abord, et on se plaira si l'on se prend au jeu à chercher dans les moindres recoins les pièces nécessaires à la customisation et la construction. Parce que plus question d'acheter, désormais le joueur se crée son équipement lui même, comme un grand. Ce qui déplaira dans doute à ceux qui avaient prévu de survoler la campagne d'ailleurs, car très vite on a besoin d'un arsenal puissant que la ligne droite sans faire attention aux objets ne permettra pas de se constituer. Pour le reste,
Dead Space 3 reste similaire à ses prédécesseurs, on conserve beaucoup d'éléments de jeu qui sont propre à la série, et ces dernier n'évoluent pas, ou pas assez.
Un nouveau décor

Avant l'atterrissage mouvementé sur
Tau Volantis, ce sont deux environnements très différents qu'il nous faudra explorer, dont une planète habitée par des humains. On y est lâché dans une ville gigantesque et un peu sale, changeant du tout au tout avec les précédents décors que la série nous ait fait connaître, un peu comme si
Dead Space avait rencontré
Deus Ex. Puis très vite on débarque dans l'espace autour de la planète susnommée, et on y restera un bout de temps, à naviguer entre les vaisseaux présents là, un peu comme à la belle époque lorsque l'on voguait dans l'
USG Ishimura. Et enfin, débarquement ultime sur
Tau Volantis, la sphère enneigée sur laquelle tout doit se finir. Trois lieux bien différents, auxquels viendront se mêler des changements de teintes et d'architectures, voilà la plus grosse force côté réalisation de ce
Dead Space 3. Sans cesse le titre d'
EA renouvelle son cadre histoire de ne pas lasser le joueur averti, c'est presque impressionnant tant c'est bien amené. Malheureusement, la suite est un peu moins reluisante. On était habitué à prendre une grosse claque en démarrant un épisode de la série, et force est de constater aujourd'hui que le troisième épisode ne marquera pas les foules pour cela. Il n'est pas moche, mais se révèle somme toute quelconque sur le plan technique. Pas surprenant pour un sous, et de surcroît pourvu d'un moteur similaire à celui du second volet datant beaucoup, seulement amélioré en quelques points que seuls les plus regardants trouveront. Il faut bien avouer que cet opus est décevant en cela, bien qu'encore une fois on ait affaire à un titre assez joli.
Décevant aussi du côté du bestiaire, qui perd avec la mort de l'horrifique son côté glauque et malsain pour gagner une image putride mais sans once de meurtre dans les yeux. Il ne fait plus peur, plus du tout, et il faut bien avouer qu'il produit parfois un effet proche du stoïcisme le plus total. Avec la disparition de la peur, les monstres ont perdu beaucoup d'intérêt, et leur découverte en devient parfaitement quelconque. Idem pour les environnements, alors que certains essaient pourtant de faire grimper la pétoche chez les plus froussards. Les très rares zones d'ombre sont presque accueillantes, rien ne produit plus désormais le moindre effet, si ce n'est les scènes haletantes emplies d'une action impressionnante. Suivre un Isaac frêle dans des moments palpitants mettant en péril sa vie instable est loin d'être désintéressant et ne laissera personne de marbre, quoique certains passages ne soient pas aussi percutants qu'escomptés. Enfin, élément qui aura beaucoup plu par le passé chez la série d'
Electronic Arts, la bande sonore de ce
Dead Space 3 se révèle particulièrement décevante, bien qu'encore une fois elle ne soit pas mauvaise. Après les exceptionnelles musiques des deux précédents, les quelconques et répétitives de celui-ci sont un choc, passant réellement inaperçu sans pour autant être mauvaises. De même avec les bruitages et hurlements qui n'ont plus aucun intérêt désormais, le titre ayant abandonné toute notion de frousse. Ils restent bons, mais puisque ne parvenant plus à nous faire tressaillir dans notre canapé ils sont bien moins appréciables. Les voix sont toujours doublées dans un Français très sympathique, et les doubleurs réalisent un travail remarquable quant à eux.